Pourquoi Pegasus est une menace ?

Article : Pourquoi Pegasus est une menace ?
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23 juillet 2021

Pourquoi Pegasus est une menace ?

L’usage presque systématique de l‘intelligence artificielle dans notre quotidien n’est pas sans conséquence. Nous sommes vulnérables et susceptibles de subir des cyberattaques ou des piratages, à l’instar de celui de Pegasus. Ce logiciel espion est devenu le centre de toutes nos inquiétudes depuis quelques jours. Et ce, à raison. Nos smartphones sont-ils sécurisés ? Si ceux de ces personnalités et même de chefs d’Etats ont cédé à l’espionnage de Pegasus, que sont nos pauvres smartphones face à ces logiciels ? Des questions qu’il est important de se poser et qui poussent à se rendre compte de la dangérosité de ce logiciel espion. Il n’y a pas de doute. Pegasus peut être dangereux, mais pourquoi ? C’est la question à laquelle je répondrai dans ce billet. Mais avant, rappelons-nous ce qu’est ce logiciel.

Qu’est-ce que le logiciel Pegasus ?

Pegasus est un logiciel espion, développé par une société israélienne du nom de NSO Group. Ce logiciel permet de surveiller les communications sur un smartphone Android ou iOS. C’est-à-dire lire les messages, écouter les conversations et les appels, les enregistrer… Bref, il permet de prendre possession du téléphone comme si on en était le propriétaire et comme si on l’avait entre ses mains. Ce logiciel devait servir à assurer des missions contre les terroristes et pour assurer la sécurité des Etats. La société israélienne qui le fournit, assure ne fournir le logiciel qu’à un groupe restreints d’Etats approuvés. D’ailleurs, j’aimerais bien savoir qui a approuvé des Etats comme la RDC, le Rwanda ou le Togo. Surtout quand on observe leur situation économique et les violations répétées des droits humains qui s’y exercent.

De plus, il faut préciser que NSO Group fait face à une forte concurrence dans la production de logiciels espions. Plusieurs sociétés de par le monde en produisent. Pegasus n’est que la partie émmergée d’un iceberg de logiciels du genre. Il y a donc tout un juteux business autour de l’espionnage d’Etat. Et on l’a vu avec les dernières révélations. Il n’y a pas que ce que les terroristes se disent qui intéressent les gouvernants, qui s’octroient ces logiciels. Ce que leurs opposants, les acteurs de la société civile, les journalistes se disent ou conservent comme information les intéresse aussi. Voilà encore un usage détourné d’une technologie sensée assurée la sécurité.

Et si la menace n’était pas Pegasus ? Mais plutôt…

La première raison pour laquelle Pegasus est une menace est qu’en réalité, nos gouvernants sont des menaces. Mieux, Pegasus en soi n’est pas un outil de mauvaise facture. Il peut s’avérer être très utile pour la protection et la sécurité d’un Etat. Traquer des délinquants, qui s’attaquent à la sûreté de l’Etat en infiltrant leur smartphone n’est pas mauvais en soi. Autrement dit, le but premier de Pegasus n’est pas mauvais. Mais, la problématique est plutôt celle des mains dans lesquelles le logiciel se retrouve. Mon propos pourrait vous surprendre ici. Mais je pense que les véritables menaces sont les gouvernants qui se servent de ces logiciels en dehors de son but primaire. Déjà, l’acquérir alors qu’on ne fait face à aucun problème sécuritaire d’envergure est un nonsens.

Ensuite, l’utiliser pour espionner des adversaires politiques ou des partenaires d’affaires est encore plus amoral. On pourra toujours ressortir la nécessité de connaître ou d’avoir un coup d’avance sur ses partenaires. Mais, ces méthodes clairement déloyales ne méritent aucun encouragement. Le pire est que ce sont les gouvernements qui engagent des campagnes de lutte contre la cybercriminalité et en faveur de la cybersécurité. Alors qu’ils sont eux même des experts en piratage et en intrusion dans la vie privée numérique. Une fois qu’on a remarqué que le plus menaçant dans l’existence d’un tel logiciel est l’usage qu’en font les gouvernants pour s’infiltrer dans la vie privée des citoyens, il faut relever que le logiciel est encore plus menaçant pour d’autres raisons.

Les smartphones, proies idéales de l’espionnage

Le smartphone d’une personne est une mine d’or de données et d’informations. Ce petit objet que l’on emporte partout et qui veille au chevet de nos lits est un véritable mouchard. Peut être que vous lisez cet article sur votre smartphone. Un logiciel espion pourrait donc détecter votre connexion sur une page internet et en déduire que vous n’approuvez pas l’usage de Pegasus dans votre pays. J’imagine ce qu’il pourrait vous arriver par la suite. Il en est ainsi pour tout ce qui se fait avec un smartphone. Il est possible d’accéder aux images, aux messages, à la caméra, à votre géolocalisation. Le plus inquiétant est que si vous êtes très prudent au point d’empêcher le déchiffrage de vos principales informations, le logiciel permet de vous écouter à votre insu. Concrêtement, on peut activer votre caméra, activer votre microphone à distance.

Autrement dit, prendre possession de votre appareil et vous espionner. Il faut dire que le smartphone est une porte d’entrée efficace dans la vie privée d’une personne. Il est relativement simple de le pénétrer. Aucun smartphone n’est impénétrable. Et c’est une raison qui justifie l’inquiétude autour de l’usage de Pegasus de façon massive. De plus, la nature et le statut des développeurs de ce logiciel renforce les inquiétudes sur sa virulence.

Des données personnelles aux mains d’entreprises privées

La collecte des données personnelles sur internet est un sujet sur lequel se penche de plus en plus d’Etats. Et la guerre avec les GAFAM pour une collecte responsable et consentie des données des utilisateurs d’internet, est rude. Ce combat n’a même pas encore atteint son pic que l’on se rend compte de l’existence de Pegasus. Et il peut y avoir une collecte massive de données sans aucun respect des règles en la matière. Un mépris des régles protectrices des données. Et comme avec les GAFAM, le logiciel est développé par une entreprise privée, mais ne peut être acquis que par des Etats. Autrement dit, l’entreprise qui développe Pegasus a accès à la liste des personnes surveillées par chacun de ses clients. Même si on devait imaginer qu’il ne s’agisse que d’un usage à des fins sécuritaires, cela signifierait que cette société a accès à des informations sensibles sur la sécurité de ces Etats. Et c’est plus que dangereux, quand on sait qu’une entreprise ne fonctionne qu’au regard de ses intérêts et en vue du profit. Ces informations sur la sûreté et la sécurité des Etats utilisateurs de Pegasus pourraient être vendues au plus offrant. Le fait que ces logiciels soient détenus et développés par des entreprises privées n’est donc pas plus rassurant.

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Pegasus est inquiétant parce qu’il permet d’accéder aux smartphones à distance. Et par la même à une masse de données personnelles confidentielles. Des données non sécurisées, puisque collectées par une entreprise privée, dont le contrôle est quasi impossible par la plupart des Etats clients. On pourrait relativiser ce danger que représente le logiciel à son utilité dans le traçage et la lutte pour des enjeux de sécurité. Mais, ce danger ne se relativise que si le logiciel fait l’objet d’un usage éthique et responsable de la part des gouvernements qui y ont accès. La plus grande menace demeure non pas ce logiciel en lui-même, mais la façon dont s’en servent les gouvernements : l’espionnage de masse.

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