Respect des principes environnementaux : le début de la solution ?
Le verdict de la COP26 n’a pas été concluant. Et il est clair que la protection de l’environnement au niveau international reste une problématique. Pourtant, il y a eu des rencontres internationales qui ont abouti à des résultats ou des avancées en matière de protection de l’environnement. On peut penser plus récemment à la COP21 qui a aboutit à l’accord de Paris, qui semble déjà en train d’être enterré par les réticences des uns et des autres à prendre de fermes engagements. Ou plus antérieurement au Sommet de Rio de 1992, qui a fixé le cadre international de protection de l’environnement.
On y retrouve un certain nombre de principes fondateurs de la sauvegarde de l’environnement. Ces principes s’imposent aux Etats parties. Des principes simples, qui, s’ils étaient respectés permettraient de freiner le réchauffement de la planète. Ici, je montrerai comment le respect des principes environnementaux est le début de la solution de la crise climatique.
Quels sont ces grands principes environnementaux qui sauveraient la planète de l’apocalypse ?
Avant tout propos, il est quand même utile d’identifier les principes environnementaux dont il est question ici. Comme je le disais en introduction, ces principes sont le fruit de règles de droit international, elles-mêmes issues des nombreux sommets internationaux. Ce sont donc :
- Le principe de prévention
- Le principe de précaution
- Le principe de pollueur-payeur
- Le principe de participation du public
- Le principe des responsabilités communes mais différenciées
- Le principe de réparation des dommages environnementaux
Une simple énumération de ces principes environnementaux ne permet pas de se rendre compte de l’impact qu’ils peuvent avoir sur notre environnement. Je vous propose d’analyser leur impact potentiel respectif sur la planète.
1- Le principe de prévention
Cette règle est née du principe 21 de la Déclaration de Stockholm et du principe 2 de la Déclaration de Rio. Concrètement, le principe de prévention veut éviter les atteintes à l’environnement du fait des actions d’un Etat. Toute action présentant un risque certain pour la planète, devra être menée en tenant compte de ce risque. Autrement dit, lorsqu’une mesure de n’importe quel Etat dans le monde est censée provoquer des dommages environnementaux, il faut que ce dernier prenne des mesures préventives pour atténuer cet impact. C’est au nom de ce principe que bon nombre d’Etats exigent des études d’impact sociales et environnementales pour les grands projets. Ce qui en soit est déjà un pas.
Mais, les études d’impact environnementales ne sont pas toujours respectées à la lettre. Bon nombre de projets sont engagés malgré les risques et les alertes contenues dans ces études. On peut penser ici aux projets considérés comme « secret défense ». Ce sont généralement des projets militaires, liés à la défense d’un Etat. Ils ne sont, en raison de leur sensibilité, pas soumis aux études d’impact environnementales. Pourtant, l’armée pollue. On a pour preuve l’armée américaine, qui à elle seule, a généré 59 millions de tonnes de CO2 en 2017. En résumé, elle pollue plus que le Portugal ou la Suède par exemple. L’application stricte du principe de prévention à ces opérations dite « secrètes » pourra réduire leur impact sur la planète. Il faut donc appliquer ce principe à toutes les opérations d’un Etat, même celles de défense.
2- Le principe de précaution
« Pour protéger l’environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les Etats selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement. »
Principe 15 de la Déclaration de Rio de 1992
Il s’agit là du prolongement du principe de prévention. Il veut que les mêmes mesures de précaution soient observées par les Etats dans les situations incertaines. Mieux, lorsque l’impact du projet sur l’environnement n’est pas clairement détectable, il faut que les Etats prennent des mesures conservatoires. Et ceci, dans l’optique de limiter les éventuels effets sur l’environnement. Il faut ajouter que ce principe veut éviter aux Etats de provoquer des dommages environnementaux dans leurs courses aux innovations… Aujourd’hui, les certitudes scientifiques sur la relation de causalité entre l’action humaine et la destruction de la planète sont indiscutables. Il n’y a donc pas de raison justifiable de ne pas inclure les aspects environnementaux dans la mise en oeuvre d’un quelconque projet.
3- Le principe du pollueur-payeur
Vous avez certainement déjà entendu l’expression « pollueur-payeur ». Il est énoncé dans le principe 16 de la Déclaration de Rio. Il est assez clair dans sa formulation :
« […] C’est le pollueur qui doit, en principe, assumer le coût de la pollution, dans le souci de l’intérêt public et sans fausser le jeu du commerce international et de l’investissement. »
Principe 16 de la Déclaration de Rio de 1992
Autrement dit, toute personne qui pollue ou qui envisage de mener une action polluante doit payer pour réparer l’impact de ses actes. Une idée assez cohérente et que beaucoup d’Etats ont intégré dans leur législation nationale. Ceci en fixant des taxes, des impôts ou encore des amendes sur certains actes polluants. Mais, ce principe est aussi censé s’appliquer entre les Etats parties. Et il est aujourd’hui difficile de remarquer un véritable respect de ce principe. Les pollueurs ne veulent pas payer !
Crédit : Iwaria
Le financement de la lutte contre le réchauffement climatique vient certes, en grande partie, des fonds provenant de ces Etats pollueurs. Mais, leur contribution est-elle proportionnelle à la pollution qu’ils dégagent ? Ce n’est bien évidemment pas le cas. L’autre preuve de l’insolvabilité des Etats pollueurs par rapport à leur pollution est le nombre de barrières qu’ils fixent avant de permettre aux Etats pauvres d’accéder au financement pour lutter contre le climat. Ce ne sont pas les fonds qui manquent :
- Fonds Vert pour le Climat (FVC)
- Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM)
- Fonds d’Investissement Climatique (FIC)
- Fonds pour l’Accélération du Développement Agricole (FADA)
- Fonds pour l’énergie durable en Afrique (SEFA)
- Fonds de développement urbain et municipal (UMDF)
- Fonds Spécial ClimDev Afrique (CDSF)…
Mais y accéder est plus qu’un chemin de croix. Pourtant, cela devrait être normal de financer la sauvegarde de notre planète, compte tenu du fait qu’ils sont les principaux acteurs de sa dégradation.
Les Etats ne sont pas les seuls à échapper au respect du principe pollueur-payeur. Il n’est pas inutile d’évoquer ici aussi les entreprises. Ces dernières se chargent de produire. Et on sait combien toute production et création de valeur est génératrice de grandes émissions de gaz à effet de serre. Ces entreprises sont soumises, dans le cadre du principe pollueur-payeur, à un certain nombre d’obligations, notamment en terme de fiscalité. On pense tout de suite à l’ecotaxe. Mais, même là encore, des business parallèles se montent autour de ces taxes. On pense ici à l’arnaque à la taxe carbone qui a vu des millions d’euros détournés.
4- Le principe de participation du public
C’est la Convention d’Aarhus du 25 juin 1998 qui a donné naissance à ce principe. Ce principe implique que les informations concernant la protection de l’environnement soient accessibles au public. Cet accès devrait permettre à tout citoyen de prendre connaissance des politiques publiques environnementales. Et ensuite, de participer à la prise de décisions. Mieux, ce principe prône l’implication des citoyens. Dans les faits, il faut remarquer deux choses : une effectivité apparente et l’exclusion de la prise de décison des citoyens.
Les apparences laissent croire en l’effectivité de l’application de ce principe. Dans les sommets, dans les rencontres internationales, les acteurs de la société civile ne manquent pas. Ils y portent la voix des peuples et des citoyens les plus touchés par le réchauffement climatique. C’est leur rôle et il s’arrête souvent là. Au moment de décider et de faire des choix décisifs, ce sont les Etats qui font les choix. Et généralement, ces choix ne correspondent pas aux demandes et aux attentes soulevées par la société civile. Il est important que le citoyen soit au coeur de la décision environnementale. Il faut démocratiser la prise de décision environnementale. Les Etats ne peuvent plus continuer de jouer à promettre indéfinimment sans agir. Il faut que les citoyens soient impliqués, pour qu’ils agissent par eux-même, s’il le faut.
Ce principe reste encore à l’étape d’un simple principe en Afrique. Beaucoup de documents renseignant sur les politiques environnementales sont difficilement accessibles. Soit, ces documents n’existent pas, soit ils contiennent des détails financiers que les politiques ne semblent pas vouloir laisser au libre-accès du public. Alors que l’intégration de tous les citoyens dans toute cette chaîne garantit une meilleure exécution des projets environnementaux. Et surtout une meilleure intégration de ceux-ci.
5- Le principe des responsabilités communes mais différenciées
On peut retrouver ici quelques similitudes avec le principe du pollueur-payeur. Il veut reconnaître la responsabilité de tous les Etats du monde dans la crise climatique. Tous les Etats doivent prendre la mesure de l’enjeu climatique et oeuvrer pour freiner le réchauffement de la planète. Ce principe va plus loin en reconnaissant un niveau de responsabilité variable en fonction du niveau de développement de chaque Etat. Ce qui signifie que les Etats riches doivent s’engager beaucoup plus pour le climat que les Etats pauvres. Le principe 7 de la Déclaration de Rio de 1992 énonce clairement cette règle.
« Les pays développés admettent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en faveur du développement durable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l’environnement mondial et des techniques et des ressources financières dont ils disposent. »
Principe 7 de la Déclaration de Rio de 1992
Dans les faits, cela semble ne pas se réaliser du tout. Les Etats les plus riches cherchent à améliorer les technologies. Ils créent de nouvelles industries, plus polluantes. Le pire est qu’ils refusent de financer la lutte contre le climat dans les pays pauvres. A titre illustratif, la lutte contre le climat devrait bénéficier d’un financement annuel de 100 milliards de dollars d’après l’accord de la COP15. Mais, les Etats ne tiennent pas cet engagement. Même à l’issue de la COP26, on regrette déjà (comme souvent) de ne pas pouvoir se rapprocher de cet objectif.
6- Le principe de réparation des dommages environnementaux
Ce principe est la bouée de sauvetage. Le dernier des principes environnementaux à appliquer dans le cas où l’application de tous les autres a échoué. Il intervient en aval, après la survenance de tout dommage environnemental. Il veut que tout Etat responsable d’un dommage environnemental puisse le réparer. Cette réparation peut, bien sûr, être pécuniaire. Mais, on l’a vu dans le billet vert précédent, la lourdeur du droit international rend ce principe difficilement applicable. Un respect plus strict de ce principe permettrait de réparer ces dommages. Il en va également de la justice climatique de veiller au respect d’un tel principe.
Crédit : Pexels
Ce qu’il faut retenir sur ces principes environnementaux
Pour résumer ce propos, il faut dire que ce ne sont pas les principes environnementaux qui manquent. Imaginons que ces principes environnementaux soient respectés à la lettre. Nos Etats prendraient en compte la protection de l’environnement dans tous les projets, qu’ils présentent un danger environnemental certain ou non. En cas de pollution, les responsables devraient payer à hauteur des taxes fixées. Ces taxes seraient réinjectées dans le financement de la lutte contre le climat. Ces financements seraient d’ailleurs réhaussés par les Etats riches au profit du développement durable des Etats pauvres. Pour dissuader davantage les pollueurs, la société civile participe et prend une part active dans le renouvellement de l’arsenal juridique sur l’environnement. La réparation de quelques dommages environnementaux est systématique.
La planète en sortirait bien plus fraiche, n’est-ce pas ? C’est bien beau, mais il y a une chose que j’ai oublié dans ce billet : ce ne sont que des principes. Charles de Gaulle disait que « les plus nobles principes du monde ne valent que par l’action ». Ces règles sont constamment violées au non d’exceptions supposées. Pourtant, atteindre ces idéaux ou du moins tendre vers eux apporteront un début de solution aux problèmes environnementaux.
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